Par Benoit RANNOU, DipACVP (pathologie clinique) & ECVCP, Laboratoire de Biologie Médicale Azurvet-Lab
Proposition d’un grade cytologique pour le mastocytome cutané chez le chien
- Scarpa F, Sabattini S, Bettini G. Cytological grading of canine cutaneous mast cell tumours. Veterinary and Comparative Oncology. 2nd ed. 2014 Apr 9; 14(3):245–51.
- Camus MS, Priest HL, Koehler JW, Driskell EA, Rakich PM, Ilha MR, et al. Cytologic Criteria for Mast Cell Tumor Grading in Dogs With Evaluation of Clinical Outcome. Veterinary Pathology. 2016 Nov; 53(6):1117–23.
Le mastocytome est une des tumeurs cutanées les plus fréquentes chez le chien, représentant près d’une tumeur cutanée sur cinq dans cette espèce. Son comportement biologique est variable allant d’une tumeur au comportement peu agressif et dont l’exérèse est généralement curative à une maladie systémique avec dissémination métastatique viscérale.
À l’heure actuelle, le grade histopathologique correspond à l’examen de référence pour prédire le comportement biologique des mastocytomes et deux systèmes de grading sont décrits. Celui de Patnaik, le plus ancien (1983), distingue 3 grades. S’il est encore très utilisé, il présente néanmoins une mauvaise reproductibilité et environ 2/3 des mastocytomes sont classés en grade 2, grade intermédiaire au comportement biologique difficilement prévisible. Celui de Kiupel, plus récent (2011), distingue des mastocytomes de bas grade ou de haut grade sur la base de critères cytomorphologiques (index mitotique, cellules multinucléées, noyau d’allure atypique, et caryomégalie). Ce système s’avère beaucoup plus reproductible entre pathologistes et identifie mieux les mastocytomes de haut grade de malignité, à haut potentiel métastatique.
Les critères utilisés pour le système de Kiupel pouvant être évalués sur des lames de cytologie. Deux études [1,2] ont essayé de déterminer si un grade cytologique pouvait être utilisé pour évaluer, de façon peu invasive, le comportement biologique des mastocytomes.
Dans une première étude publiée en 2014, Scarpa et collègues [1] ont mis en évidence une bonne corrélation (94 %) entre le grade cytologique (reprenant tous les critères du grade histopathologique de Kiupel et al.) et le grade histopathologique de Kiupel avec notamment une sensibilité de 84 % et une spécificité de 97 %. Au sein du groupe de mastocytomes de haut grade à l’histologie, deux mastocytomes sur treize (15 %) ont cependant été classés comme de bas grade à la cytologie.
Camus et collègues [2] ont par la suite cherché à établir un système de grade cytologique spécifique, reproductible et fortement corrélé au système histopathologique de Kiupel. Les auteurs ont proposé un grade cytologique dans lequel étaient classés comme mastocytomes de haut grade, les mastocytomes peu granulaires ou pour lesquels au moins deux des quatre critères suivants étaient présents : figures de mitose, cellules bi- ou multi-nucléées, anisocaryose modérée à marquée, et pléomorphisme nucléaire. Dans leur étude, leur système présentait une sensibilité de 88 % et une spécificité de 94 % ; les chiens présentant un mastocytome de haut grade selon ce grade cytologique avaient 25 fois plus de risque de mourir dans les deux ans que les chiens présentant un mastocytome de bas grade. À noter cependant une valeur prédictive positive de seulement 70 % ce qui signifie que 30 % de mastocytomes classés comme de haut grade selon le grade cytologique étaient classés en bas grade selon le grade histopathologique de Kiupel.
Le développement d’un grade cytologique représente un outil pronostic de première ligne avec un réel potentiel pour le mastocytome cutané canin.
Photo 1 : Mastocytome bien différencié classé comme bas grade à la cytologie (objectif x50, huile à immersion, coloration MMG). Crédit photo : Azurvet-Lab
Photo 2 : Mastocytome peu granulaire classé comme haut grade à la cytologie (objectif x50, huile à immersion, coloration MMG). Crédit photo : Azurvet-Lab
Figure 1 : Courbe de survie (Kaplan-Meyer) en fonction des grades cytologiques et histologiques (extrait de [2])