Imagerie lors de suspicion de thymome chez le chien

Partager ce poste

Par Laurent COUTURIER, DipECVDI, spécialiste en imagerie médicale.

Les thymomes sont la deuxième cause de tumeur médiastinale chez le chien après le lymphome thymique et correspondent à des tumeurs épithéliales issus du tissu thymique, ce dernier contenant également des cellules lymphocytaires non tumorales, voire des mastocytes et des éosinophiles. La distinction thymome / lymphome est capitale pour la prise en charge du patient et le gold standard reste la biopsie pré opératoire. Les thymomes relèvent de la chirurgie tandis que les lymphomes de la chimiothérapie. Ces tumeurs sont localisées dans le médiastin crânioventral et ont un comportement soit bénin, soit malin. Une prédisposition semble démontrée chez le berger allemand et le labrador et cette tumeur affecte davantage les animaux âgés que le lymphome médiastinal. Les thymomes sont parfois responsables de signes cliniques neuromusculaires lors de syndrome de myasthenia gravis paranéoplasique. D’où l’importance de les dépister lors d’affection neuro-musculaire en particulier chez l’animal âgé. Les autres syndromes paranéoplasiques rencontrés sont l’hypercalcémie maligne, le syndrome cave crânial.


Le diagnostic différentiel des masses médiastinales inclut :

- Le thymome

- Le carcinome thymique

- Le lymphome médiastinal (origine dans les NL) ou thymique (origine dans le tissu thymique).

- Le carcinome thyroïdien ectopique

- Les tumeurs des corps carotidiens

- Les kystes brachiaux.

- une façon anecdotique dans des case reports : fibrosarcome, carcinome neuroendocrine, sarcome, adénocarcinome parathyroïdien, hémangiosarcome

- Une lésion bénigne : kyste, abcès, granulome, hématome.

Il n’existe pas d’image typique de thymome, néanmoins quelques subtilités d’interprétation des examens d’imagerie associées à un environnement clinique en faveur permettent de formuler cette hypothèse.

Sur les radiographies, les signes de masse médiastinale crâniale sont (figure 1) :


- Une masse d’opacité tissulaire localisée dans le médiastin crânial avec déplacement dorsal de la trachée, déplacement caudal de la bifurcation trachéobronchique et de la silhouette cardiaque

- Un élargissement du médiastin sur l’incidence VD ou VD et notamment de sa réflexion crânioventrale.

- Lors de thymome, des signes radiographiques supplémentaires peuvent être présents lors de myasthénie associée : méga-œsophage et bronchopneumonie par fausse route avec opacification alvéolaire ventrale et généralement asymétrique (si un seul lobe atteint).

Figure 1. Très volumineux thymome chez un chien (les deux images de G) avec déviation dorsale de la trachée, élargissement sévère du médiastin crânial sur l’incidence de face (flèches jaunes, en bas à G). Thymome de taille moins importante chez un labrador (comparer la largeur du médiastin sur les deux vues de face en bas à G et en bas à D) avec myasthenia gravis associée et mégaoesophage (têtes de flèche bleues).

A l’échographie, une étude (Patterson et al, 2014) montre que les thymomes sont plus hétérogènes avec une composante kystique (Figure 2) en comparaison des lymphomes thymiques. L’échographie de contraste a également montré des prises de contraste différentes entre lymphome (uptake centrifuge uniforme) et thymome (uptake centripète hétérogène).

La masse médiastinale est parfois plus difficile à visualiser lorsque son volume est peu important notamment dans les races à thorax peu profond.

Figure 2. Volumineuse masse médiastinale compatible avec un thymome chez un chat âgé à l'échographie. Noter la présence de multiples petites structures kystiques (*).

En scanner, les signes de thymome (Figure 4) décrits sont (Von Stade et al, 2019 – Reeve et al, 2020) :

- Une masse de volume variable (pouvant être de petite taille à une large masse).

- Un envahissement vasculaire potentiel avec une prévalence de 30% dans une étude.

- Les masses de petite taille sont majoritairement homogènes en pré contraste, contrairement aux larges masses qui sont plutôt kystiques et hétérogènes en pré contraste.

- Des métastases sont visibles dans 20% des cas ainsi qu’un épanchement pleural (syndrome cave).

- Le thymome est plus hétérogène que le lymphome avec une déviation standard de sa densité post contraste plus élevée pour le thymome (SD > 17 UH = thymome avec une sensibilité de 72% et une spécificité de 79%).

- Le lymphome a plus tendance que le thymome à encercler la veine cave crâniale (Figure 3).

- Il n’y a pas de différence entre les deux tumeurs pour les signes suivants : envahissement vasculaire, épanchement pleural, calcifications, adénopathie, forme de la masse.

Figure 3. Lymphome thymique chez un chien. Noter l’aspect homogène de la masse, sa localisation crânioventrale asymétrique G, l’encerclement de la veine cave crâniale (*) par la lésion.

Figure 4. Thymome chez un chien. Noter l’aspect plus hétérogène de la masse (images en haut à G et en haut à D) en comparaison de la figure 3. L’écart type de la densité de la lésion mesurée en unités Houndsfield est de 17 UH (images en bas à G et en bas à D).

Conclusion : il n’existe pas d’image typique de thymome à l’imagerie et cette hypothèse est formulée dans le diagnostic différentiel de toute masse médiastinale crâniale. Néanmoins, dans un contexte clinique en faveur, certains signes radiologiques permettent de hiérarchiser le différentiel et privilégier cette hypothèse.


Bibliographie


von Stade L, Randall EK, Rao S, Marolf AJ. CT imaging features of canine thymomas. Vet Radiol Ultrasound. 2019 Nov;60(6):659-667


Reeve EJ, Mapletoft EK, Schiborra F, Maddox TW, Lamb CR, Warren-Smith CMR. Mediastinal lymphoma in dogs is homogeneous compared to thymic epithelial neoplasia and is more likely to envelop the cranial vena cava in CT images. Vet Radiol Ultrasound. 2020 Jan;61(1):25-32


Patterson MM, Marolf AJ. Sonographic characteristics of thymoma compared with mediastinal lymphoma. J Am Anim Hosp Assoc. 2014;50:409-413.